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Source d'huile en Amérique
Il y a environ dix ans, près de Bruckerville (Kentuky), perforant un puits artésien pour obtenir de l'eau salée, et parvenu déjà, à tra- vers un lit de roches solides, à une profondeur de plus de 200 pieds, nous perçumes une source d'huile pure, qui dès ce moment lance un jet continuel qui s'élevait à 12 pieds au-dessus de la surface du sol. Quoique l'intensité du jet diminuât un peu, quelques minutes après la première éruption, que l'on suppose avoir donné alors 75 gallons à la minute, elle continua plusieurs jours sans interruption. Le puits se trouvant près de l'embouchure et sur les bords d'un petit creek qui décharge ses eaux dans la rivière Cumbernland, l'huile ainsi projetée vint se répandre et flotta jusqu'à une grande distance sur la surface des eaux. Plusieurs habitants au bas de la côte, curieux de savoir si cette huile (ou plus exactement ce bitume), possédait des pro- priétés inflamables, y appliquèrent une torche. Avec la rapidité de l'éclair cette matière s'enflamma et les habitants jouirent du spectacle uni- que d'une rivière embrasée, dont les flammes atteignaient les escarpe- ments les plus élevés et embrasaient le sommet des arbres, à la grande frayeur et au préjudice reel des habitants. Cette huile ou bitume est très-inflammable : elle produit une clarté aussi pure et aussi brillante que celle du gaz? Ses autres propriétés étaient alors inconnues; mais une grande quantité ayant été mise en barils, on s'aperçut bientôt que tout avait passé en coulage. Cette substance est tellement volatile qu'il est impossible de la renfer- mer dans des futailles de bois, et elle contient une si grande quantité de gaz que souvent elle fait éclater les vaisseaux qui la contiennent lors- qu'ils sont hermétiquement bouchés. Sa couleur est verte, mais, expo- sée à l'air, elle prend une teinte brune. Cette substance est extrement volatille, a une odeur âcre et indéfinissable et le goût de l'essence de goudron. Pendant un court espace de temps, après la découverte de cette source, une petite quantité d'huile venait, lorsque l'on pompait l'eau salée, ce qui a conduit à l'idée que l'on pouvait toujours l'extraire par le jet de la pompe. Cependant toute nouvelle tentative pour en obtenir, excepté par un jet spontané, a été entièrement infructueuse. Pendant les six dernières années, il y a eu deux émissions par jet spontané. La der- nière commença le 4 juillet 1835 et dura environ six semaines, pendant lesquelles on recueillit environ 20 barriques d'huile. Lorsque la source émet ce sujet spontané, l'huile et l'eau salée avec laquelle elle est constamment combinée, sont lancées dans le corps de la pompe, sans doute par la force des gaz qui tend à se dégager à une hauteur de plus de 200 pieds, et de là viennent couler par l'orifice su- périeur, dans une auge couverte, où l'eau se dégageant de l'huile, se précipite au fond, et cette dernière surnage à la surface. Un bruit sourd ressemblant au grondement lointain du tonnerre, accompagne l'émission, d'un jet d'huile, tandis que le gaz qui est bien visible à l'ouverture du haut de la pompe fait demander à tous les étrangers qui passent si le puits est en feu. Bientôt après la découverte de cette source, on supposa que l'huile possédait des vertus médicinales. Cette idée conduisit un grand nombre de personnes à en faire l'épreuve dans une grande variété de cas. Ceux qui l'ont essayée comme médicament, en recommandent l'usage pour le rhumatisme, la phthysie pulmonaire, la dyspepsie, la coli- que d'intestins, les coupures, blessures et en général toutes les ma- ladies de peau. On dit qu'elle soutient les malades cinq minutes après qu'on l'a ap- pliquée sur les brûlures, et qu'elle peut servir de spécifique pour les coliques, les écorchures et toute espèce de maladies de chevaux. On lui a donné le nom de "Huile américaine", et dans ces dernières années elle a joui d'une très-grande réputation dans les états de Kentuky et d'Ohio.
L'Abeille de la Nouvelle Orléans.
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